L’IA (l’Intelligence Artificielle) est l’un des sujets centraux évoqués ces dernières années. Elle représente pour certains un Eldorado vers lequel il est nécessaire de se diriger. Les années à venir seront intrinsèquement liées à l’usage qui sera fait de l’IA.
Les débats sur la gestion de l’IA, sa législation et même son « lieu de production » sont des sujets qui sont régulièrement abordés. Pourquoi ? Parce que les entreprises travaillant sur l’IA aujourd’hui sont majoritairement américaines et ont connu une ascension fulgurante ces dernières années. Le meilleur exemple que l’on puisse citer aujourd’hui est celui de ChatGPT, lancé en novembre 2022 et qui a réussi l’exploit de dépasser les 100 millions d’utilisateurs en février dernier, connaissant ainsi l’une des croissances les plus rapides sur internet.
L’avènement de ChatGPT a entraîné dans la foulée la création de pléthore d’IA génératives de textes ou même d’images. Andreessen Horiwitz a d’ailleurs publié une étude répertoriant 50 IA génératives, en les classant en fonction du nombre de visites effectuées sur leurs interfaces web. Et que peut-on tirer de cette étude ? Sans surprise, ChatGPT domine largement le marché. Toutefois, en troisième position se hisse un nom qui ne sera inconnu pour personne : le leader mondial des moteurs de recherche, le géant Google et son IA Google Bard. Il est vrai que Google n’a pas pour habitude d’être relégué en bas du podium.
C’est dans ce contexte que Google a annoncé la venue d’une nouvelle mise à jour de son moteur de recherche : la SGE Google ou « Search Generative Experience ».
Google SGE : qu’est-ce que c’est ?
Search Generative Experience (SGE) est un nouvel outil (toujours à l’essai) que Google met à disposition de ses utilisateurs. La SGE est pour l’internaute une interface simple et interactive qui lui permettra d’avoir un « snapshot » (signifiant instantané en français) des données informationnelles présentes dans les sites référencés par Google.
La SGE (Search Generative Expérience) va générer grâce à une IA de type « agent conversationnel » des réponses basées sur l’intention de recherche des utilisateurs et regroupant des données sur diverses pages web.
Quelle est la différence entre la SGE et les résultats de recherches enrichis que proposait déjà Google avant cette mise à jour ? C’est très simple : auparavant, Google utilisait un extrait du texte de la page référencée. Maintenant, Google va utiliser les sites indexés et les textes qui les composent pour créer sa propre réponse à la requête.
Ainsi, en activant « Ask a follow up », l’IA interprétera l’intention de recherche des utilisateurs en fonction du contexte et des termes utilisés dans la requête. Ensuite, l’IA agrégera les données présentes sur les sites internet référencés (blog, e-commerce, forum…) dans Google pour en extraire un résumé, en sélectionnant les informations qui lui sembleront importantes. Pour finir, l’IA générative proposera son condensé d’informations aux utilisateurs directement dans la SERP.
Si la réponse apportée par l’IA ne semble pas concluante pour les internautes, ces derniers pourront choisir de poursuivre leurs recherches (sans quitter la SERP). Ils pourront demander à l’IA générative, à la manière de ChatGPT, de retravailler son rendu, et ainsi affiner sa réponse ou bien, par exemple, lui demander de générer un texte plus long.
Toujours dans le sillage des IA génératives, cette fois-ci sur le modèle de l’IA de MidJourney, la SGE Google permettra à l’internaute non pas de dénicher l’image parfaite hébergée sur telle ou telle page web, mais bien de créer sa propre image.
Ainsi, la réponse du géant pour contrer le développement des IA génératives et rester le leader mondial des moteurs de recherche s’est un peu fait attendre, mais est maintenant annoncée officiellement.
Les limites de la SGE de Google
La SGE annonce certes une révolution de nos usages, mais elle n’est toutefois pas dépourvue de défauts. En effet, lors des tests effectués sur la version accessible de la SGE, certains problèmes, notamment liés à l’IA générative, ont pu être soulignés :
- Des problèmes de traduction: lors de la génération de réponses, la SGE interprète différents textes indexés par Google. Cette interprétation peut être altérée par le langage utilisé par les textes d’origine, faussant ainsi le résultat.
- Une interprétation biaisée : pour générer ses réponses, l’IA générative de la SGE s’appuie exclusivement sur des sites proposant des contenus qualitatifs (et les tops résultats Google). Toutefois, si les individus traitant des sujets informationnels ont tendance à avoir des opinions communes (ce qui peut être influencé par la manière dont l’utilisateur rédige sa requête), alors la réponse générée ira dans le sens de ces opinions. Ce biais est connu du moteur de recherche, qui tente de le réduire le plus possible afin que la SGE puisse adopter un ton neutre et factuel.
- Représentation des faits faussée : c’est un problème identifié de manière récurrente sur des outils faisant appel à des IA génératives pour interpréter des faits. L’IA peut s’avérer être inexacte dans sa manière de raconter les faits.
- Duplicata et contraire : dans ce que sera la SGE de Google, on risque d’observer des duplications de contenus, voire des éléments contradictoires entre les différents outils que le leader des moteurs de recherche met à disposition des internautes. En effet, si les extraits en vedette (l’actuelle position 0) sont utilisés par l’IA pour générer sa réponse, l’utilisateur pourrait voir apparaître une duplication de contenus dans la SERP. Il en va de même si ce fameux article en vedette ne reflète pas la même opinion ou est en désaccord avec les éléments de réponses sur lesquels s’appuiera la SGE pour formuler son texte.
Quel sera l’impact de la SGE de Google ?
Au cours de nos recherches à propos de la SGE de Google, nous avons lu des articles alertant au sujet de la mise à jour de Google. Certains prédisent une baisse drastique du CTR (taux de clic) suite au lancement de la SGE. Une baisse de 30% du CTR sur le SEA (Search Engine Advertising) et le SEO (Search Engine Optimisation) confondus est envisagée.
L’impact de Google SGE sur le SEA
Effectivement, une baisse du trafic devrait être observée sur les pages référencées par le moteur de recherche. Cependant, pour les sites ayant recours au SEA, le constat pourrait être moins amer que pour ceux ayant basé l’intégralité de leur stratégie digitale sur le SEO.
Sur la première version mise en place de la SGE aux États-Unis, il a été observé que les résultats payants, les ads, apparaissaient bien dans les premiers résultats proposés par Google. Ces derniers ne descendront donc pas plus bas que leur position de référencement initiale dans le moteur de recherche.
De plus, de nouveaux formats publicitaires pourraient voir le jour. C’est en tout cas ce que suppose le consultant SEO Glenn Gabe sur X :
Glenn Gabe a constaté lors de ses tests, la présence d’un carrousel sponsorisé dans l’encart SGE Google. Ce format ads est apparu à la suite de questions ayant suivi la requête initiale.
Attention toutefois : Mr. Gabe nuance son propos, il n’a pu observer ce comportement de la SGE Google qu’une seule journée.
Entrevu également dans des vidéos de présentation de la SGE :
Le module est donc suspecté comme étant à l’essai chez le géant Google, mais rien n’est encore acté. Bien que Mr. Gabe ne soit pas le seul à évoquer cette évolution des ads, cela s’apparente plutôt à des bruits de couloirs, restez-donc vigilants.
L’impact de Google SGE sur le SEO
Pour le SEO, le sujet de l’impact de la SGE est un peu plus délicat que pour le SEA. En effet, personne n’ignore l’importance d’apparaître parmi les premiers résultats de recherche, toutefois cette hégémonie de la première place Google tend à être remise en cause.
En effet, les résultats SGE venant se placer au-dessus des résultats naturels de Google, ces derniers risquent de passer en dessous de la ligne de flottaison dans la SERP. Et ne dit-on pas « loin des yeux, loin du cœur » ? Le risque pour les adeptes du 100% SEO est donc de voir les internautes ne plus scroller pour atteindre le lien les envoyant vers leur site internet.
Cela étant dit, tous les sites ne seront pas logés à la même enseigne. En effet, l’IA générative, au travers de la Search Generative Experience, va pouvoir proposer aux internautes un ensemble de marchandises en fonction de leur intention de recherche transactionnelle. Cela nous donne encore une fois envie de faire un parallèle avec les résultats enrichis… En effet, pour toutes les requêtes concernant des marchandises spécifiques, l’IA générative de Google aura pour vocation de proposer un panel d’options produits. Mais, en plus des diverses informations que Google affiche déjà avec les résultats enrichis, telles que les prix et les images produits, la SGE affichera également les évaluations et les avis consommateurs. Cet ajout visant à conserver les internautes dans la SERP impactera sans aucun doute le taux de clic lié aux requêtes transactionnelles.
Toutefois, le point à soulever ici cependant est le suivant : si l’internaute veut ajouter un article au panier ou tout simplement passer en caisse, ce dernier devra nécessairement se rendre sur votre site. Le clic sera donc bien compté dans vos outils de tracking, la conversion également. La mutation est donc une réalité pour les sites à l’intention de recherche transactionnelle : le parcours client évolue, toutefois le combat SEO reste capital pour ceux voulant être mis en avant directement dans la SERP Google.
On en arrive à ceux qui sont considérés comme les laissés pour compte de cette révolution SGE : les sites dont l’intention de recherche est informationnelle (type blog, site vitrine, forum…). Pour tous ceux-là, rangez votre potion magique d’irréductible Gaulois, les opportunités SEO existent ! Google cherchant à faire de son outil un moteur de réponse, la SGE a tout de même pour objectif d’améliorer l’expérience utilisateur. Et dans cette optique user friendly, Google va proposer une toute nouvelle « position 0 ». Les sites présents dans cette nouvelle position seront ceux qui auront un fort « taux de contribution » à la réponse générée par l’IA.
La question suivante est donc : comment la SGE Google génère son texte avec son IA ? Outre le fait de s’appuyer sur le contexte des questions et de l’intention de recherche utilisateur, les tests tendent à montrer que Google génère ses textes à partir de sites ayant un bon référencement naturel.
La SGE annonce-t-elle la fin du référencement naturel SEO ?
Vous l’aurez compris, il semble évident que la réponse à cette question est : non. Google affronte les nouvelles technologies que sont les IA génératives tout en continuant sur la lancée qu’il avait déjà amorcée : devenir un « moteur de réponse » voire même un « moteur conversationnel ».
Cette transformation n’a donc rien de nouveau, elle avait commencé avec l’avènement des commandes vocales. Le champ de bataille SEO n’en sera pas révolutionné, il n’en sera que quelque peu déplacé. En effet, au lieu de viser la traditionnelle 1ère position, vous viserez maintenant les nouvelles positions 0. Au lieu de penser vos textes SEO dans l’optique de répondre aux intentions de recherche des internautes et donc aux fameux « People Also Ask », vous les penserez de sorte qu’ils aident l’IA générative de Google à créer une réponse satisfaisante et naturelle pour l’utilisateur. Cela vous aidera aussi à figurer en position 0, par conséquent, la boucle est bouclée : le SEO ne tombera pas en désuétude.
La SGE semble ainsi être une version de recherche enrichie +++ et s’inscrit donc dans l’évolution naturelle du « moteur de réponse » que cherche à atteindre Google.
Comment optimiser son référencement naturel pour la SGE de Google ?
Prioriser la longue traîne
Depuis les requêtes vocales, la longue traîne revêt de plus en plus d’importance, et elle va sûrement voir son intérêt décuplé avec la SGE. En effet, pour générer un contenu dans la SGE, il faudra rédiger une question, une consigne, et formuler une intention, d’où l’utilisation plus importante qui sera faite des mots-clés longue traîne.
Des textes orientés expérience utilisateur
Google cherche à devenir une IA conversationnelle, une intelligence avec laquelle on peut échanger « couramment ». Ce qui faciliterait pour l’IA de Google la génération de textes naturels, « parlés », ce serait d’utiliser des textes qui le sont déjà. Par conséquent, afin de favoriser votre apparition dans les positions 0, il semble pertinent de travailler le phrasé de votre contenu.
Des textes qui apportent des réponses ou de l’inédit
Le cœur de la bataille, le point différenciant : les éléments de réponse, la donnée.
Google veut pouvoir répondre aux questions de ses internautes, favorisez donc des articles qui contiennent soit des informations inédites, soit des avis. Débattez, apportez de nouveaux points de vue… Google aura besoin de ces éléments pour générer son contenu. Il faut le voir comme une donnée structurée de type « People Also Ask ».
Optimiser le netlinking
Pour les plateformes e-commerce particulièrement, il sera très important d’optimiser son netlinking. Augmenter votre occurrence sur le web vous permettra d’augmenter vos chances de voir vos produits proposés dans le contenu de la SGE.
Pour faire simple : on s’investit à fond dans la démarche EEAT. On y ajoute un langage « parlé » qui reste châtié, parfait pour l’oral.
Pour conclure, bien que le trafic risque de chuter sur les pages informationnelles, les plus touchés par la SGE seront ceux qui ont basé l’intégralité de leur stratégie digitale sur du SEO.
Toutefois, les fameuses positions 0, même si elles contribuent dans une certaine mesure à la chute de votre trafic, seront bénéfiques pour votre notoriété. L’attention portée à la formulation de vos textes, à l’optimisation des mots-clés à longue traîne et à la mise en avant EEAT seront, selon nous, les chevaux de bataille sur lesquels il faudra miser pour atteindre vos objectifs marketing.
Doit-on bloquer l’IA de la SGE de Google ?
La question est légitime : devons-nous bloquer l’IA de Google afin de rester « propriétaire » des éléments textuels et graphiques dont fait usage notre site internet ? Nous croyons fermement qu’il est nécessaire, en l’état, de laisser Google se servir de vos sites (hors sites de presses rémunérés) afin d’alimenter son IA générative. Notre avis est le suivant : ne plus être indexé correctement par le moteur de recherche s’avérerait bien plus pénalisant pour votre trafic que la SGE elle-même.
De plus, comment vont s’appliquer les lois européennes qui traitent de l’IA et de la propriété intellectuelle ? Surtout dans notre cadre européen qui se veut protecteur et restrictif. Des limitations, à l’image des normes RGPD, pourraient voir le jour. Selon l’arbitrage qui sera mené sur l’utilisation de la donnée par nos instances, des liens d’attribution pourraient devenir obligatoires pour le géant des moteurs de recherche et ainsi devenir (en plus des nouvelles positions 0) une mise en avant non négligeable de votre site dans la SERP.
Toujours dans un cadre juridique à définir, se posera également la question pour Google et son IA générative de l’exactitude des réponses apportées. En effet, on pourrait constater d’éventuelles déconvenues juridiques suite à la publication d’intox par la SGE. Par conséquent, laisser la « propriété » de l’information au site qui l’héberge via la mise en avant de liens d’attribution pourrait servir de protection à Google.
Des réglementations pourraient être mises en place et défavoriser votre site, cela dit, cette stratégie ne nous semble pas pertinente. Par ailleurs, qu’est-ce qui nous assure que les internautes vont majoritairement recourir à ce nouvel outil et délaisser le système de recherche classique ?
Pour conclure, notez que 20% des 1000 plus grands sites web ont déjà bloqué les bots de ChatGPT en septembre 2023, selon Originality.ai. Ces géants du web tels qu’Amazon, le New York Times ou Shutterstocks vont-ils en faire de même avec l’IA de la SGE Google ? Si oui, notre réponse à la question précédemment posée pourrait peut-être évoluer…
D’après Michael King, la Search Generative Experience serait déjà présente dans 40% des cas de recherche Google et plus seulement aux États-Unis. Le géant a déjà commencé à mettre à disposition ce format dans 120 pays, parmi lesquels ne figurent ni la France ni aucun pays européen. N’a-t-on pas évoqué d’éventuelles problématiques de législation ? En attendant, si vous souhaitez tester ce nouvel outil, faites chauffer vos VPN.